Chrétiens, venez tous écouter Une complainte véritable : C'est de trois monstres inhumains Leurs crimes sont épouvantables. Il y a bien environ vingt ans Qu'ils assassinaient les passants. A Peyre-Abeille, en Vivarais, Dans le département d'Ardèche, Sur une montagne isolée, Ils établirent leur commerce. L'auberge est sur le grand chemin, Où ils égorgeaient les humains Leur nom sont pierre Blanc Martin Dit : Lucifer, avec sa femme, Et Jean Rochette aussi inhumain, Était domestique exécrable Trop tard, le crime est découvert, Pour épargner de grand malheur. Le premier homme assassiné, Était marchand de dentelle; Dans le lit il fut assommé. Pour eux, c'était que bagatelle; Ce premier coup était garant De vingt sept ou huit mille francs. Un curieux Parisien courait, Disait-il pour sa fantaisie, Chez Lucifer il vint loger, Le mauvais temps lui fit surprise. Son cheval dans les champs, Annonça la mort du passant. Plus tard les morts étaient traités D'une méthode différente : Dans une chaudière la chair cuisait, Couverte avec indifférence. Avec cette préparation, Ils en engraissaient leur cochon. Un bon préfet disgracié Sous la chute de Bonaparte, Chez Lucifer il fut loger, Croyant être en sure porte. Femme, enfant, fortune et lui, Périrent tous la même nuit. Le dernier enfant de huit ans, Voyant ses parents, morts par terre, Poussa les cris les plus perçants, Demandant vie aux téméraires. Ces monstres furent sans pitié : A l'instant il fut assommé. Un dortoir était réservé Aux voyageurs portant fortune; Double porte était pratiquée : La nuit, sans faire de murmure, Rochette armé de son trident, Au cou saisissait les dormants. | La victime, la bouche ouvrant, Pour implorer quelque assistance, La femme avec l'huile bouillante, Leur gorgeait la bouché béante, Lucifer, à coups de marteau, Mettait la victime au tombeau. Alors Martin faisait grand bruit, Feignant de maltraiter sa femme, Pour que personne ne comprit Qu'ils assassinaient leur semblable. Dis-donc, pourquoi viens tu troubler Ceux qui sont pour se reposer ? Un grand four était embrasé, Pour consumer bien des affaires : Carrosses, manteaux et harnais. Pour eux, des signes téméraires. Il en sortait exhalaisons, Qui empestaient les environs. Dans le principe, ces brigands Étaient dépourvus de fortune. Mais bientôt, de l'or, de l'argent, Trouvèrent bien leur aventure. Pour famille, deux filles ont, Qui secondent bien leur maison. On ne pourra jamais savoir Le nombre de tant de victimes : On les porte à cinquante trois, Qu'a révélé le domestique. Frémissez, toutes nations, Des crimes de cette maison. Plus longtemps, on aurait tardé D'en faire quelque découverte : Ce dernier étant réservé . Par ainsi, Dieu voulut leur perte. Au crime, ils sont si acharnés, Qu'un parent n'est pas épargné. L'an mil huit cent trente trois , Justement le second d'octobre, Devant la maison des forfaits, Vers midi fut le dernier rôle. Trente mille témoins voyaient Trancher la tête aux trois brigands. Grand Dieu, la terre préservez ! De jamais porter de tels monstres. Aucune histoire n'a prouvé Qu'il n'y eut jamais de la sorte. Par les soins de l'autorité, Nul n'y sera plus exposé. |